Déjà considérée comme « pressée de maisons et fort peuplée »  au milieu du XVIe siècle, Saint-Malo étouffe littéralement dans ses murs à la fin du siècle suivant. Encerclée par la mer, disposant de moins de 16 ha de territoire urbain, la population intra muros compte alors plus de 20 000 habitants. Aussi, la vie industrielle et commerciale s’affranchit de son rocher au cours du XVIIe siècle et colonise tout le pourtour du port d’échouage. Le cordon dunaire qui mène du Sillon à Rocabey accueille des moulins puis des chantiers navals cependant qu’au centre du port d’échouage, les îlots des Talards, où l’on construit des navires, voient s’établir, à la fin du siècle, deux grandes corderies. Cette famine d’espace profite à Saint-Servan qui se développe alors rapidement en accueillant entrepôts et chantiers de construction, ainsi qu’un hôpital général. 

Si, à la fin du siècle, la ville est bien protégée des attaques venues de la mer grâce aux travaux conduits entre 1689 et 1695 par le marquis de Vauban, elle reste en revanche sans défense pour un ennemi venu de terre. Vauban établit donc en 1696 un plan ambitieux de création d’un bassin à flot, isolé par une écluse et protégé par une enceinte fortifiée, mais l’hostilité des Malouins fait échouer ce très complexe projet qui ne sera finalement et partiellement mis à exécution qu’au XIXe puis au XXe siècle. 

Fuyant l’exiguïté de l’intra muros et rachetant les manoirs de la campagne malouine, les armateurs les plus prospères ont pris dès 1650 l’habitude de faire construire autour de Saint-Malo de grandes résidences secondaires cachées derrière de hauts murs. Bâties en nombre croissant après 1700, ces malouinières de granit marquent aujourd’hui encore l’urbanisation de la campagne cernant la cité corsaire.