Parsemés de bancs rocheux et balayés de courants violents qui sont la conséquence d’un marnage classé parmi les plus importants du monde, plus de 10 m, les atterrages de Saint-Malo sont réputés depuis toujours pour leur dangerosité. Et pourtant ! Ce port fut pendant des siècles l’un des plus actifs de la France maritime, « le plus beau port qui soit en nostre Royaume » aurait déclaré Charles VII en 1493. 

Au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles, le port d’échouage comme les rades foraines sont le plus souvent encombrés car le trafic annuel excède 3000 mouvements de barque et de navires pour un tonnage des échanges de plus de 100 000 tonneaux. Cette double conjoncture qui associe un environnement hostile à un mouvement maritime incessant justifie par avance tous les incidents, toutes les fortunes de mer. Servi par trois passes étroites et cernées de récifs, la « passe de la petite porte », la « Passe de la grande Conchée » et « la passe du décolé », le port déplore ainsi chaque année des naufrages dont les registres d’entrée, aujourd’hui consignés aux Archives Départementales d’Ille-et-Vilaine, ont préservé jusqu’à nous le sinistre décompte. La Charmante, La Providence, Le Saint-Jean Baptiste, La Paix, … du caboteur de 25 tonneaux à la grande frégate armée à la course ou engagée dans les commerces planétaires ou la pêche à Terre-Neuve, on se perd à Saint-Malo et il n’est pas exagéré d’écrire que les abords de la cité corsaire recèlent sans doute l’un des plus grands cimetières d’épaves au monde.