Dans l’architecture islamique des XIIe et XIIIe siècles, le hammam fut, au côté de la mosquée et de la résidence palatiale, l’une des composantes principales des complexes militaro-palatins érigés par les princes ayyoubides, les sultans mamelouks et leurs émirs. Généralement présenté comme une annexe de la mosquée, en tant que lieu de purification rituelle avant la prière, le bain remplissait aussi des fonctions plus pragmatiques liées à l’hygiène corporelle, mais aussi ludiques héritées de l’Antiquité ; c’était enfin un lieu de sociabilité.

Au Crac des Chevaliers, la construction du hammam s’inscrit dans la phase de transformation de la forteresse en résidence palatiale. La date de son édification n’est renseignée ni par les textes ni par l’épigraphie, mais sa construction fut sans doute parmi les premières réalisations mameloukes. Sa localisation, à distance des appartements de l’émir, et sa taille importante indiquent qu’il était destiné à la garnison tout entière et non à l’usage exclusif des élites militaires.

L'organisation du bain du Crac

Le bain occupait l’angle sud-est de la forteresse au niveau des lices méridionales. Cet emplacement lui était tout destiné, puisqu’il se trouvait en contrebas du grand réservoir qui alimentait sa cuve.

L'accès au hammam s'effectuait par le vestiaire (al-barrâni), où l’on se déshabillait et revêtait une serviette autour de la taille, la nudité étant proscrite. Cette salle quadrangulaire est dotée de quatre niches recevant des banquettes en-dessous desquelles étaient aménagées onze logettes pour les effets personnels. Elle est voûtée d’arêtes et possède en son centre une large fontaine avec un bassin octogonal qui permettait de rafraîchir l’atmosphère durant le temps de détente et de repos après le bain.

Du vestiaire partait un couloir en U qui desservait des latrines, puis la pièce tiède (al-wastâni) et enfin l’étuve (al-juwâni). La pièce tiède est une petite salle surélevée dotée d’une fontaine et surmontée d’une coupole. Les salles chaudes du bain sont disposées symétriquement de part et d’autre de l’étuve. Elles possèdent une vasque dans laquelle s’écoulait l’eau chaude et l’eau froide. L’étuve est une pièce quadrangulaire qui était couverte d’une coupole partiellement ornée de muqarnas. Une niche accueille deux vasques et une petite fenêtre permettait à la vapeur de s’échapper de la cuve et d’inonder la pièce.